Nos travaux portent sur la recherche et la caractérisation de nouveaux mécanismes responsables de l’organisation de l’ADN dans le noyau. Nous cherchons en particulier à comprendre les phénomènes génétiques qui impliquent des interactions entre régions d’ADN homologues et a priori intactes. De façon remarquable, ces types de processus sont ubiquitaires. Cependant, leur nature moléculaire reste l’une des plus importantes questions non résolues en biologie.
En utilisant, comme système modèle, le phénomène préméiotique RIP (Repeat Induced Point mutation) chez le champignon filamenteux Neurospora crassa, nous avons montré que deux séquences d’ADN homologues peuvent être reconnues grâce à un mécanisme fondamentalement nouveau. En effet, dans ce processus, deux longs segments d’ADN double brins sont comparés l’un à l’autre via des motifs de triplets de paires de bases. Il est important de noter que ce mécanisme ne requiert pas de protéines de type RecA. La capacité du RIP à détecter deux régions d’ADN identiques quelles que soient leur position suggère que ce processus implique une recherche exhaustive d’homologies dans le génome par comparaison « génome vs génome ». En conséquence, ce mécanisme est particulièrement efficace. Curieusement, nous avons mis en évidence que les mutations due au RIP sont régulées par une voie épigénétique comprenant notamment la méthyltransférase de type SUV39, DIM-5, qui catalyse la triméthylation de la lysine 9 de l’histone 3. Ainsi, nous avons proposé que les méthyltransférases de type SUV39 pourraient être recrutées au niveau des séquences répétées de l’ADN ab initio, en réponse à des interactions homologues entre ADN double brins. Nos travaux en cours, en collaboration avec le laboratoire de Tom Hammond, ont révélé que les principes de reconnaissance de séquences homologues qui guident le RIP sont également applicables au mécanisme MSUD (Meiotic Silencing by Unpaired DNA). Ces nouveaux résultats (i) révèlent le rôle d’un mécanisme de reconnaissance d’homologies (directe et indépendant de la recombinaison) dans l’expression des petits ARN interférents, (ii) suggèrent que les chromosomes homologues peuvent s’associer durant la méiose selon un processus fondé sur l’interaction de double hélices d’ADN intactes, et (iii) permettent d’envisager que ce type de mécanisme indépendant de la recombinaison constituerait un mode de recherche et de reconnaissance d’homologies général, peut-être même fondamental.
Les projets actuels et futurs du laboratoire comprennent (i) la recherche des facteurs moléculaires qui reconnaissent les séquences d’ADN répétée chez N. crassa, (ii) la mise en évidence du mécanisme de recrutement de DIM-5 au niveau des séquences répétées chez N. crassa, (iv) l’utilisation d’un éventail de techniques d’imagerie pour caractériser l’état de la chromatine dans les noyaux en phase préméiotique chez N. crassa, et (v) la détermination du rôle de l’hétérochromatine durant la croissance invasive du pathogène humain, Aspergillus fumigatus.